En creusant toujours plus profond en nous, nous approchons du « trésor » qui nous habite et nous fait être.
Françoise Servigne
… Que je prenne encore davantage conscience du trésor merveilleux qui, quotidiennement, sans qu’en rien je le sache, s’est proposé à moi dans le champ de ma vie ! La réussite dans l’échec, le salut dans la perdition, l’identité dans le mouvant, le devenir dans le présent, l’unité dans le déploiement… Ce trésor que j’ai peu à peu découvert : la beauté reconnue, la transparence échangée, l’intimité partagée, la vérité accueillie, toutes distances abolies… Ce trésor que, pour le temps qui me reste à vivre, la secrète Réalité au coeur même du réel m’a entr’ouvert pour une « éternité » d’au-delà de mon regard, mais dont le seuil déjà s’annonce à l’horizon, tel l’aube de l’aurore…
… Quand je veux me comprendre dans le droit fil de mon histoire au travers de ce que ma mémoire m’a conservé d’elle, je me trouve devant moi-même comme devant un être inconnaissable dans sa totalité une et singulière ; un être qui, au-delà de la conscience qu’il a de lui, devient sous une action au plus intime qui n’est pas que de lui… En moi, ce qui est le plus moi-même est mystère pour moi. Tout ce que je sais de moi ne relève que de façon indirecte et seulement éloignée de ce que je suis. Toutes les connaissances que peu à peu j’acquiers de moi m’aident à m’approfondir mais, si je m’y arrête, elles me dissimulent à moi-même. Devant ma réalité toute plongée dans le silence et la solitude au coeur de l’Univers immense, placé sur quelle trajectoire, en route vers quelle destinée, je découvre l’importance de mes jours les plus ordinaires et leur gravité. Au soir de ma vie, que j’accueille les heures qui encore me sont laissées, quelles se comptent en années, en mois ou en journées ! Que je recueille celles que dans mon passé j’ai vécues comme je l’ai pu ! Par ce que toutes elles me font devenir, qu’elles participent à l’Acte impensable qu’est Dieu dans son mystère!
Méditation d’un chrétien du XXe siècle, Aubier, Paris, 1983, p. 152, 302.