MURS
Mur de Berlin, enfin anéanti… Mur de Trump harnaché de réseaux policiers… Murs de Poutine et Mur de Grèce, pour contenir le dynamisme de la survie. Pour se protéger, exclure, oublier la douleur de l’autre. Guerre froide au lieu du vivre ensemble.
Pourquoi faut-il que les hommes se plaisent à la dureté du prédateur, du guerrier, du conquérant ?
METISSAGES
En 1975, j’étais à Mexico City lors de la Conférence mondiale des Nations Unies pour la Décennie de la femme. En ce lieu appelé « Place des trois cultures » depuis l’immeuble moderne aux grandes baies vitrées, les congressistes apercevaient les traces au sol de ce qui fut jadis un marché aztèque et, plus loin subsistaient les ruines d’un Collège où des franciscains espagnols avaient scolarisé des fils de ces Aztèques soumis. Une inscription résumait ces quelques siècles d’histoire brutale :
« Il n’y eut ici ni vainqueurs ni vaincus, mais la naissance douloureuse d’un Peuple métissé, le Peuple du Mexique. »
Euphémisme, ce récit de la douleur… Les hardis navigateurs du 16e siècle avaient cherché une nouvelle route des épices ; les suivants ont fait halte et se sont jetés sur l’or
Ce genre de drame humain dure encore !
POUDRE et PAPIER
On nous avait dit que les Chinois étaient les inventeurs de la poudre à canon et du papier. Si le fait est exact, l’humanité a fait de celle-là un usage désastreux, de l’autre, en revanche elle a tiré d’abondantes ressources, ambigües. Gutenberg, par l’invention de l’imprimerie en a amplifié les effets.
Pourquoi évoquer ici l’imprimerie, le papier ? Parce que Marcel Légaut a été un grand communicateur, non seulement par la parole et les rencontres, mais aussi par l’écriture. Le train et d’innombrables « bic » ont été les vecteurs constants de cette fécondité spirituelle.
J’ai gardé une petite image du Centre oecuménique de Lyon, que dirigeait avant Vatican II, le père Michalon. On y voyait la silhouette d’églises et de temples, accolés les uns aux autres, d’où s’élançait un oiseau… Elle donnait le sens : « Les murs de la séparation ne montent pas jusqu’au ciel. » L’oiseau, c’était la prière, la pensée, les relations se jouant de nos barrages humains. C’était la transcendance de l’Esprit…
RIDEAU DE FER ?
Encore au temps de la « guerre froide », j’ai eu entre les mains un petit livre de Légaut traduit en polonais : « Vivre pour être ». Le papier frêle en était tout jauni. Un ami nous a parlé un jour à la Magnanerie d’une famille qu’il visitait à Prague et qui cachait dans le plus grand secret « L’homme à la recherche de son humanité ». Je crois bien que Vaclav Havel attendait encore en prison le jour de sa libération. Et moi ? C’est en Afrique où je fus « missionnée durant 28 ans, que je découvris aussi grâce au papier, celui des Etudes 1970, le nom de Marcel Légaut en avant de l’article « La passion de l’Eglise ».
6 NOVEMBRE 2019
Cinquante ans ont passé ! Ce soir-là dans notre logis de Louvain-la-Neuve, grâce à l’amitié de Françoise Servigne, la voix si bien modulée de Gérard Rouzier nous restituait les « Prières d’homme » de Légaut : « Infimes, éphémères, mais nécessaires… »
Et ces voix l’étaient en ce moment, Gérard et Anne relisant pour nous : « Vie spirituelle et modernité ».
Ce beau message nous restait adressé comme une question qui demeure.
Thérèse De Scott