Quelques nouvelles mars 2025
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DEVENIR DISCIPLE DE JÉSUS (1)
Ce soir, ce que je voudrais vous dire ne sera pas commode, parce que ça ne supporte pas le style ordinaire d’une conférence. C’est plutôt du genre méditation. On ne médite pas n’importe quand, on ne médite pas à volonté. Alors, j’espère que vous m’aiderez, par votre propre présence, à ce que je sois suffisamment présent à moi-même, pour que je ne
vous dise pas des choses trop creuses, mais des choses réelles.
Le titre de cette méditation est : « Devenir disciple de Jésus aujourd’hui ». Pour moi, même si ce n’est pas dans le titre mais dans mon idée, c’est être disciple comme ont été pour l’essentiel, il y a vingt siècles, pendant quelques mois, les quelques juifs qui ont rencontré Jésus, l’ont suivi et ont cru en lui. Actualiser, réaliser ce qui s’est passé il y a vingt siècles, c’est, me semble-t-il, une condition indispensable maintenant pour être chrétien, non seulement croyant de pratique, mais encore suffisamment chrétien pour aider l’Église à
surmonter la crise qu’elle connaît actuellement, et lui permettre de remplir sa mission. Voilà le centre de la méditation que je vais faire avec vous ce soir. Mais avant, je voudrais vous faire une petite introduction pour que l’esprit dans lequel je vous parlerai soit aussi celui dans lequel vous m’aiderez.
Je suis chrétien, catholique de chrétienté, catholique d’origine. Je suis né avec le siècle en France. Au début de ce siècle, nous étions encore en chrétienté. J’ai été formé au catéchisme comme tous les enfants de l’époque, mais je n’ai pas été porté du tout vers les études qui permettaient d’être un peu technicien des sciences qui tournent autour du
christianisme. Je ne suis pas du tout théologien, je ne suis pas du tout philosophe, je n’ai rien fait en psychologie… je n’ai même pas le moindre diplôme de catéchète. La seule chose que je revendique pour moi – et c’est la seule raison pour laquelle je suis avec vous ce soir – c’est que j’ai été chrétien toute ma vie et pas seulement pratiquant.
Par la grâce d’une rencontre que j’ai faite vers 20 ans avec un prêtre qui m’a ouvert sur la vie spirituelle, les quesons religieuses m’ont toujours profondément passionné. Quand, pendant 50 ans à peu près d’une vie consciente, on s’est toujours profondément intéressé aux questions religieuses, même si l’on n’a pas de culture universitaire [dans ce domaine], il y a une certaine culture qui progressivement se développe, qui reste et qui fait que, sans aucune autorité, on peut parler tout de même avec un certain intérêt.
Je ne suis pas venu vous enseigner. Si je fais partie de l’Église enseignante, c’est tout au bas de l’échelle. Pratiquement, je n’ai aucune technique. Aussi, je vais vous dire comment j’essaie moi-même de devenir disciple. Les réflexions que je vais vous faire, ont été depuis très longtemps les miennes. Mais incontestablement, la crise que nous rencontrons
actuellement, que probablement aucun n’avait pensé devoir être aussi profonde et aussi rapide, cette crise évidemment a provoqué en moi beaucoup de réflexions, de méditation, d’inquiétude, d’espérance. C’est dans ce climat que je voudrais développer ma réflexion avec vous ce soir. (à suivre).
Marcel LÉGAUT, Bruxelles 1976
Marcel Légaut Arcles et conférences
Cahier 8 Tome II p 274 (Ed. X. Huot)
Edito - mars 2025
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Le divin, peut-être
Francine Carrillo dans « Filigrane », p.21, son dernier livre, nous dit : « … Efforce-toi de devenir, car c’est précisément cela… être ! Toi aussi, tu as à être, toi aussi, tu seras ! Et si cette injonction est portée par les quatre lettres imprononçables, YHWH, qui dessinent vraisemblablement une forme du verbe être au futur, c’est pour signifier que Dieu habite l’humain avant tout comme un “Peut-être“ qui soutient une parole propre à libérer sa vitalité : non pas “Tu dois“ mais “Tu peux“ ! »
Elly Hillesum découvre Dieu en elle-même. Elle va jusqu’à dire que nous avons à le faire exister. Ce qu’elle pratique en étant le cœur vivant de la baraque, dit-elle, baraque d’un camp de concentraon pour les juifs pendant les années de guerre.
Ernst Wiechert est un écrivain de langue allemande. Il a été détenu en camp de concentraon sous la dictature nazie, pour ses idées développées devant ses étudiants contre l’esprit de conquête et d’oppression. Oublié aujourd’hui, il est mort en 1950 en Suisse. J’ai découvert cet auteur grâce à Marcel Légaut. Dans son roman « Les enfants Jéromine » nous pouvons rencontrer un pasteur qui a perdu la foi après avoir enterré de nombreux enfants d’un pauvre village qui vit comme il y a quelques siècles. Cet homme est soutenu par tous les habitants sans le juger et avec bienveillance. La foi en Dieu y est interrogée tout le long de chacun de ses romans. L’oeuvre d’Ernst Wiechert est nourrie de la bible à chaque page.
Dans l’évangile de Luc, en chemin vers Emmaüs, j’apprécie beaucoup ce moment où Jésus explique à deux de ses disciples les écritures le concernant. Le lecteur sait seulement que leur cœur était brûlant ; j’aurais aimé entendre cet échange sans doute très dense. Je suis bouleversé aussi quand, rentrés dans l’auberge, à la fraction du pain, ils le reconnaissent et leurs yeux s’ouvrent sur une absence.
Avancer malgré tout sur notre chemin d’intériorité avec plus de questions que de réponses, puisque c’est en marchant qu’on le découvre : « En route donc encore une fois ! Je suis un marcheur voûté par ses doutes. Mais il arrive que des souffles bienheureux m’emportent », nous dit Philippe Jaccottet. (dans œuvres pléiade « L’habitant de Grignan » p 94)
Jean-Yves Poisson
Où Marcel et Marguerite Légaut mettent-ils les pieds en s’installant aux Granges-de-Lesches (Diois) en novembre 1940 ?
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Quand je suis arrivé dans mon pays, il y a trente-sept ans déjà, tous les hommes qui [155] professaient la religion catholique (la région est en gros mi-catholique, mi-protestante) allaient à la messe régulièrement les dimanches (sauf en automne, pendant l'ouverture de la chasse…). C'était chez eux une coutume qui remontait à des siècles... Depuis que la messe n'est plus célébrée dans leur village que de temps en temps, à intervalle de plusieurs mois – et demain ce ne sera plus que pendant les vacances par des prêtres estivants ou de passage – il est significatif qu'à part les quelques vieux, de moins en moins nombreux, assujettis à leurs habitudes, les jeunes et plus généralement les « actifs » ne souffrent absolument pas de cette situation au point même de ne plus aller à la messe les quelques dimanches où elle est encore célébrée…
Ainsi, ce qu'on aurait pu croire enraciné par une pratique multi-séculaire dans ce peuple, qui travaille de père en fils la terre de famille, se trouve en voie de disparition comme si rien dans le passé n'en avait existé. La race est saine, courageuse, digne de la liberté des êtres responsables de leur travail. Le grain de l'évangile n'a rien perdu de sa puissance de germination dans le coeur de l'homme, mais nul n'a su le semer à la profondeur humaine voulue. Il faut oser le dire. L'Église a à peine commencé l'évangélisation du monde, elle s'est seulement efforcée de le moraliser. Elle a en partie réussi à le civiliser. Il faut le reconnaître. On s'en aperçoit quand son influence disparaît. Alors l'antique barbarie païenne réapparaît avec d'ailleurs des moyens et des techniques de violence perfectionnées…
Pouvait-il en être autrement dans le passé ?
Les Granges-de-Lesches pendant la seconde guerre mondiale
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Interrogée par un résistant diois, Jean Abonnenc[1], Marguerite Légaut retrace, en 2004, la vie aux Granges-de-Lesches durant la seconde guerre mondiale[2]. Voici les extraits concernant cette période :
« Pendant la guerre et après, nous n’avons jamais été plus de dix-sept et malgré cela, nous avons eu souvent faim.
Nous n’avons jamais eu de problèmes religieux. La menace qui pesait sur tant de personnes physiquement faisait un peu des questions religieuses un luxe. Nous n’avons eu que quatre juifs pendant presque toute la guerre et quelques passages. Il y a eu mes beaux-parents, trois enfants, quatre ou cinq juifs, de jeunes alsaciens, un allemand (neveu de Molke [sic ??? pour le général prussien, c’est Moltke) et beaucoup de passage… [Mon mari] n’a jamais fait de résistance. Un des dirigeants lui avait demandé de ne pas venir parce que mon mari était capitaine et le dirigeant résistant n’était pas aussi gradé. En plus, je ne pense pas que cela l’aurait beaucoup intéressé.
Ce qui me frappe beaucoup, c’est de repenser à ce qu’on croyait alors et qui maintenant paraît une aberration : on disait quand les allemands arriveront, on attellera les bœufs à la charrette et on partira dans la montagne. Je ne sais si cette déformation en concerne que nous ou si c’est général : si un certain nombre de personnes manquait de réalisme comme nous.
En face de la maison, de l’autre côté de la vallée, on avait construit une cabane où les plus menacés pouvaient aller dormir. Il y avait une grande porte à glissière et on disait à ceux qui dormaient dans la cabane « si la porte à glissière est ouverte c’est que vous pouvez descendre, si non, ne descendez pas ». Mais jamais les allemands ne sont venus.
Nous avons eu souvent faim. On mangeait des feuilles de betterave, des topinambours en disant « c’est comme du fond d’artichauts ou encore de la vesce. On avait peu de pommes de terre et comme on interdisait la chasse, ce sont les sangliers qui mangeaient les pommes de terre.
Les paysans faisaient du beurre avec de la crème de lait de chèvre. Cela faisait longtemps que la terre n’était plus travaillée, il n’y avait plus d’engrais et une quinzaine de moutons ne donnent guère de fumier. »
[1] Il n’est pas trop tard pour parler de Résistance.
[2] Le document est aux Archives de la Drôme, coté 327 J 368. Je remercie le directeur des archives et son personnel de la mise à disposition d’une copie.
Il y a du monde sur les marges : comment Marcel Légaut contribuait à diffuser sa réflexion
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Une documentation écrite permet, de juillet 1986 à octobre 1990, de saisir comment la réflexion de Marcel Légaut était diffusée, avec humour, par un « conférencier mondain ». En 1986, Marcel Légaut a son œuvre derrière lui ; il a suffisamment explicité dans nombre de « médit »(ations) que la mort vient mettre une borne à notre existence, et que certains vont vers leur mort, à commencer par le Maître jadis… Et, de fait, le « prédicateur itinérant » moderne épouse la mort en Avignon, le 6 novembre 1990. Les différentes communautés avec lesquelles il a vécu et qui se sont organisées autour de lui aboutissent à la possibilité de séjours communs à Mirmande ou à des conférences ; ses dix-huit ouvrages ont paru, les derniers étant centrés sur l’Église : Croire en l’Église de l’avenir (1985), et un dialogue exigeant d’Un homme de foi (avec) son Église, en 1988.
Arrivent donc à Valcroissant, aux Granges, à Mirmande, des courriers lui demandant des interventions proches. Légaut les a classés par mois, avec un récapitulatif sur une feuille 21/29,7, dactylographiée et corrigée de sa main, qui, pliée, sert de couverture. Agenda, horaires de chemin de fer, questions concrètes d’hébergement (aucune question financière, Légaut donne son temps) permettent de voir comment fonctionne cette galaxie, de février 1986 à octobre 1989[1].
Carte vraisemblablement de Tante Zette, l’épouse d’André Glossinde à Marie-Ange Girard
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Carte (vraisemblablement de Tante Zette, l’épouse d’André Glossinde à Marie-Ange Girard, le 10 décembre 1982)
Les documents attestant des relations humaines entre membres du groupe Légaut sont rares, appartenant à la sphère privée, à laquelle l’historien a rarement accès. Un chemin balisé conduit toutefois à l’un ou l’autre document. Au point de départ, Marguerite Rossignol, l’épouse de Marcel Légaut. Sa formation d’assistante sociale, aux tous débuts de cette profession, amène à jeter un œil sur les écrits de Madeleine Delbrêl, à commencer par Nous autres gens des rues. À Mirmande, où finissent par se loger des bibliothèques de camarades disparus (celle de Bernard Bœuf est entrée l’an passé et il existe une étude de la lecture effectuée par ce dernier sur le site de l’ACML, rubrique Histoire), se trouvait Alcide. Guide simple pour simples chrétiens, fruit de réflexions de Madeleine Delbrêl, édité en 1966 au Seuil, puis réédité, notamment en 1980. Dans cet ouvrage, une carte illustrée d’une naissance de Jésus, tapisserie du milieu du XVIe s., imprimée par les puissantes éditions de l’abbaye bénédictine de Beuron, fondatrice de Maredsous… Et Tante Zette (+ 1994), lumineuse épouse d’André Glossinde (+ 1989), d’envoyer Alcide à Marie-Ange Girard et de lui écrire :
Colloque international du centenaire du groupe Légaut
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Colloque international du centenaire du groupe Légaut
(Valence, Archives départementales, 10-11 septembre 2025).
DANS UN SIECLE OU DEUX, QUAND UN NOUVEAU BREMOND... (1)
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[A propos de Jean Guitton ]
Les années qui suivirent le premier conflit mondial marquèrent pour toute leur vie et de façon spécialement bénéfique les jeunes qui achevaient alors leurs études. Pendant leur adolescence, ils avaient déjà reçu la formation sévère mais tonique des années de guerre, marquées d’un patriotisme et d’un civisme dont il est difficile de se faire aujourd’hui une idée exacte.
D’autre part, les promotions d’après-guerre des grandes écoles réunirent des démobilisés des classes les plus récentes et des jeunes que la conscription n’avait pas encore atteints. Ces derniers, dont faisait partie Jean Guitton, gagnèrent beaucoup à ce contact journalier avec leurs camarades d’études, à peine plus âgés qu’eux, mais déjà mûris par la dure existence qu’ils venaient de mener (2).
L’implosion ? Entretiens sur le présent et l’avenir du catholicisme
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Danielle Hervieu-Léger, Jean-Louis Schlegel
Seuil, 2022, 392 p.
Un livre d’entretien entre deux auteurs au courant des débats actuels et ayant travaillé à partir d’un constat : le catholicisme est devenu minoritaire en France, et la tendance est lourde, accentuée par la publication de la Commission indépendante sur les abus sexuels de l’Église (CIASE), en octobre 2021, qui a révélé 330.000 victimes sur soixante-dix ans. S’y ajoute la divergence entre catholiques à l’égard de la célébration de la messe par temps d’épidémie :
« […] l’épisode a confirmé que l’Institution est en train de perdre le contrôle sur l’image que l’Église entend donner d’elle-même dans la société. Des laïcs, issus d’un courant circonscrit au sein de l’Église, ont pris l’initiative du recours devant le Conseil d’État, en se présentant de leur propre chef comme l’expression de la voix des catholiques. Le coup a été réussi, mais au prix d’une défaite de la majorité des évêques par rapport à une minorité activiste « tradi » (p. 51-52).
Centenaire du groupe Légaut - 1925-2025
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Le centenaire du groupe Légaut en 2025.
En 1925, à la rentrée, Marcel Légaut, à Normale sup. va méditer les évangiles avec des normaliens de Saint Cloud, ouvrant ainsi l’univers du premier degré de l’enseignement à sa réflexion, celle d’un laïc. Le groupe Légaut, sans grande ossature, naît et après des péripéties variées, de Paris à Chadefaud dans le Massif Central, puis Les Granges de Lesches et Mirmande dans la Drôme, perpétue ses rencontres jusqu’à ce jour.
Il y aura plusieurs manifestations en 2025. Certes le conseil d’administration des 14-16 février 2023 a validé trois évènements :
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La mise en numérisation de l’oeuvre complète de Marcel Légaut, avec sa mise à disposition par le site de l’ACML. Paul Roux a piloté l’ensemble avec l’aide de nombre de membres de l’ACML, Serge Couderc, Jean-Jacques Chevalier, Jocelyn Goulet, Chantal Decoorebyter, François-Xavier Légaut, Dominique Roux, Rémy Légaut, Dominique Lerch, ...
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Une date : 10 septembre 2025 est à retenir à Valence aux Archives départementales (à côté de la Préfecture). Vous trouverez ci-joint l’appel à contributions qui concerne la vie des groupes, le rayonnement de Marcel Légaut, son apport, ses racines. N’hésitez pas à proposer des éléments, nous pourrions avoir une partie d’échanges sur la vie des groupes en suite des communications. Mais nous aurons aussi besoin de quelques coups de main pour l’accueil des communicants, l’hôtellerie, les repas, surtout si la journée d’études devient un colloque international où l’Espagne et le Québec sont d’ores et déjà partants et où nous ne désespérons pas d’avoir une contribution belge.