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Année anniversaire 1900-1990-2020

  « Légèrement » prêtre, disait l’un ...

« un peu » prêtre, disait l’autre ...

            Bernard Feillet, qui vient de nous quitter, affectionnait cette posture de « légèreté », se gardant  d’un rôle convenu, d’une identité d’emprunt, du risque de sclérose cléricale. Il aura toujours préféré être le « sourcier» mettant à jour, en pleine lumière éditoriale, les chemins de l’intériorité. Ses introductions dialoguées avec Jean Sulivan comme avec Marcel Légaut demeurent des puits d’eau vive. Bernard n’aura eu de cesse de forer les subjectivités en direction de l’absolu, reconnaissant ceux qui partagent « l’aventure personnelle, l’aventure prodigieuse, communauté de nos aurores. »(René Char). Son appel singulier le conduisait toujours en direction des « anonymes de l’espérance,  qui se tiennent loin de l’Église, mais sont au cœur de l’attente des hommes. » (L’errance)

           Bourgeon Gérard Bessière, l’ami prêtre de Luzech, passionné de Jésus, « le dieu inattendu », s’amuse  quant à lui, dans son dernier livre Au seuil du silence de l’expression « un peu prêtre » venue sur les lèvres d’une jeune fille à son propos : « Ne serait-il pas un peu prêtre ? J’aime bien « un peu ». » dit-il en un sourire.

            C’est encore cette même posture qui conduit Raphaël Buyse à quitter l’agitation pastorale pour l’enfouissement simple dans un lieu de silence habité comme le monastère de Clerlande, juste pour se laisser traverser par le « Souffle du Ciel » et rejoindre les hommes dans l’authenticité de leurs aspirations, « l’évangile fait de nous les plus contemporains des hommes ». « Autrement, Dieu » (Bayard, 2019)

            Nous sommes encore les héritiers d’une tradition de surplomb qui cherchait à imposer par une structure, des rites et obligations, un  univers à part. Jusqu’à sortir du quotidien vital. C’est, entre autres, le thème du film Les éblouis de Sarah Succo. Il y a, au contraire ou mieux au cœur, une tradition du bourgeon qui s’attache non pas à une institution mais à un style né de l’intérieur  : « Nous n’avons pas à peindre un bourgeon sur un papier en en copiant un autre, un bourgeon pousse de l’intérieur. En étant strictement fidèle aux  impératifs de l’amour, nous serons le bourgeon que Dieu veut aujourd’hui, sans cesse relié par l’intérieur au tronc, poussant nos feuilles l’une après l’autre... » Ainsi écrivait Madeleine Delbrêl.

 

           

            Autant de mots choisis, de figures amies, invitant à retrouver et à conserver le chemin du dedans, le puits d’eau vive qui nous fait enraciner dans la parole féconde de Marcel Légaut, nous conduisant à l’intériorité, au sérieux, à la présence au Soleil intérieur.

            « C’est du soleil qui ne meurt pas » avait glissé le curé de Lesches, lors des obsèques de Marcel Légaut à Die en 1990. Il finissait : « Vivez dans  cette lumière, cher ami. »

           

            Toute une année 2o20, millésime d’exception, pour se mettre en marche.

                                   Joseph Thomas