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PATIENCE ET PASSION

Juste et belle, l’alliance de ces termes choisis pour revisiter à deux voix l’aventure spirituelle, encore inachevée, d’une vie, d’une spiritualité, d’une appartenance à l’Eglise.

« Patience et passion d’un croyant » (1976).  Bernard Feillet séjourna une semaine aux Granges de Lesches, pour s’entretenir avec Marcel Légaut. Il en tira ce livre, plusieurs fois réédité. Plus tard, Légaut se présenta lui-même comme « chrétien du XXe siècle ».

Le titre le plus inspirant fut peut-être celui que Bernard Feillet proposa pour le dernier ouvrage de Légaut : « Un homme de foi et son Eglise ». Hélas ! ce livre était le résidu d’un long entretien avec un pasteur de Genève au sujet du Concile Vatican II et de la problématique du changement. Le projet subit quelques tourments.

La patience fut dans l’existence de Légaut une vertu au long cours, tenace, persévérante à travers les temps et les lieux, et surtout fidèle. La passion, feu secret, insaisissable, joie et douleur. Elles font la grandeur de l’être, de l’âme.

Sans cesse ?

Il arrive que, le moment venu, quelques mots viennent nous surprendre et ne se laissent pas oublier. Tel avait été le titre d’un article paru dans une revue jésuite : « Etudes ». L’auteur était pour moi un inconnu. « La passion de l’Eglise », de quoi s’agissait-il ?

A peine arrivée de Kinshasa en Belgique, un livre de Marcel Légaut vint à moi, offert amicalement, sans insistance : « On en parle beaucoup ici mais tu peux l’échanger à la librairie si tu l’as déjà ». Le titre « Introduction à l’intelligence du passé et de l’avenir du christianisme » me parut un peu compliqué. N’ayant pas le temps d’aller à la librairie, j’ai lu ce livre. Sur la 4e de couverture, un visage, dans un petit cadre noir-gris ; autour une notice.

Dans les années qui ont suivi j’ai lu « L’homme à la recherche de son humanité », « Mutation de l’Eglise et conversion personnelle » ainsi que « Travail de la foi ». Le titre de chacun de ces livres m’apparut comme un chantier où œuvrer sans cesse.

 

MIRMANDE

Novembre 1976, Marcel Légaut donne une conférence à Bruxelles.

J’étais rentrée définitivement au pays.

Devant un auditoire très nombreux, il développa ce soir-là, une esquisse sans cesse à repenser de la vie de Jésus, thème remarquable d’un de ses derniers livres. Puis il y eut une pause tandis qu’une corbeille circulait pour recueillir les questions. J’y avais mis ma demande d’être reçue. Il glissa ce papier dans une poche, avec d’autres, je crois. Le surlendemain, la personne qui l’hébergeait me convoqua à une heure assez matinale. Les samedis les transports publics sont moins fréquents. J’ai raté mon tram et l’entrevue se limita à 10 minutes. Elle suffit pour être essentielle. Surtout, - était-ce la chose décisive - Légaut me proposa de venir quelques jours à Mirmande l’été suivant. La Magnanerie réunissait à cette époque, autour de Légaut, des « camarades » et amis ou sympa-thisants de trois générations. A la communauté fondatrice se greffait un réseau de plus en plus vaste. Je découvrais une très belle histoire, des créativités foisonnantes.

INFIMES, EPHEMERES MAIS NECESSAIRES

6 Novembre 1990, Légaut nous quittait, sans nous laisser orphelins car il nous confiait une œuvre encore à comprendre et à poursuivre. Ses livres sont un appel. Plusieurs sont un chantier encore béant qui attend penseurs, acteurs, créateurs.

Ce laïc qui a traversé le XXe siècle, le théologien Joseph Moingt s.j. l’a inscrit dans la tradition vivante de l’Eglise, en lui consacrant plusieurs pages dans un de ses ouvrages majeurs.

Et nous, en ces temps difficiles, quelle sera notre part pour déployer cette œuvre ?

Thérèse De Scott