Oreiller d’herbe ou le voyage poétique
SÔSEKI
Au printemps, un jeune artiste peintre décide de se retirer dans la montagne, loin des passions et de l’agitation de la cité. Il rencontre une jeune femme malicieuse et fantasque et rêve de peindre le tableau qui exprimerait enfin son idéal.
« Que je regarde devant ou derrière moi, mes désirs ni mes souhaits ne s’accomplissent. Notre rire le plus sincère renferme la douleur, les plus tristes pensées font les chants les plus doux »
Nami est une très belle femme mystérieuse. Elle l’accueille dans son auberge. Ses voisins pensent qu’elle est folle. En fait sa famille est riche, elle s’est mariée, elle a divorcé, c’est contraire à toutes les traditions et s’en moque.
C’est la guerre entre la Russie et le Japon. La conscription et les départs à la guerre : son mari dont elle est séparée et son cousin sont terrifiés de partir.
Voyage des conscrits accompagnés par leurs familles en barque vers la gare. Par jeu elle demande au peintre de lui faire son portrait : il n’est pas prêt. Il ne voit pas encore l’expression à donner à son visage. Ce départ est symbolisé par le train, ce long serpent mécanique qui rend tout irréversible, le défilé des wagons et ce bruit mécanique, à la gare c’est la foule... le train démarre, des visages apparaissent aux fenêtres des wagons dont celui de son cousin transi de peur, un peu plus loin celui de son ex-mari barbu et hagard ; le train avance, les wagons défilent et dans le visage de Nami, à la stupeur se mêle l’expression d’une tendresse empreinte de nostalgie comme une humanité consentie : le peintre y voit enfin l’expression qui lui manquait pour faire son portrait...
Humanité consentie. Cette expression me semble exprimer un pas vers plus d’humanité dans notre parcours personnel.
Le mot « consenti » sous-entend une contrainte acceptée : suite a un événement marquant Nami fait un pas. Un pas qui permet d’en faire d’autres. Qu’est-ce la vie sinon vivre, changer, choisir, et en fait prendre sa responsabilité. Prendre sa vie au sérieux.
Une citation : « Il faut faire ce que l’on peut, faire aujourd’hui, ou demain, même ce qui est possible aujourd’hui ne le sera plus ».
Rémy LÉGAUT
Image: sculpture de Renée Collet (avec son autorisation)