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        Chers amis, nous venons d'être projetés en avant, comme « jetés » dans des « travaux pratiques » avant même toute pensée plus théorique sur le thème que nous nous étions donné pour  démarrer cette année 2020.  En effet, nous devions inaugurer une année exceptionnelle pour nous, car marquée, faut-il le rappeler, par  les deux « trentenaires » que sont la disparition de Marcel Légaut,  et la naissance de l'ACML, et cette inauguration débutait à notre rencontre pour l'AG d'avril, en particulier à la lumière d'une réflexion et d'un échange sur « la vie intérieure, l'intériorité ». Le confinement mondial imposé à chacun de nous tous, humains, pour lutter contre la pandémie virale  en a décidé autrement.  Mais rien ne nous empêche, et plutôt nous autorise, nous incite, nous pousse à approfondir ce thème silencieusement d'abord en notre for intérieur, toutes affaires cessantes, ou presque (si nos engagements sociaux nous en laissent la disponibilité), et sans dérogation à fournir à  quiconque.

            Mon projet pour cet édito de mai était de vous raconter une histoire (vraie) qui aurait trouvé sa place naturelle juste après la rencontre d'avril. Las ! Même si les circonstances ont changé, je vais le faire, et d'autant plus, car ces circonstances autour de nous, très bousculées, entrent en résonance avec le sujet-même de cette histoire, qui prend de fait un relief et des couleurs plus vives et ajustées.

           Cette histoire donc, vraie, mais aussi personnelle, m'est arrivée ces derniers mois, et elle traite à sa façon de ce thème de l'intériorité, tout en « brodant » si l'on peut dire autour d'un  « anniversaire » aussi... Et cela, grâce à l'entremise de jeunes personnes qui sont encore bien loin d'avoir atteint leurs trente années d'existence...

           mainsenfant1 Voilà, tout a commencé l'été dernier : en cadeau d'anniversaire pour mon entrée dans une nouvelle dizaine, mes trois petites-filles (âgées alors entre 16 et 8 ans) m'ont donné un album à dessins dont elles avaient réalisé elles-mêmes les premières planches, « m' offrant » de continuer à mon tour l'aventure qui se profilait, ou qui se « dessinait » (c'est le cas de le dire) si j 'entrais dans la proposition... Et c'était bien une « aventure », et pour elles et pour moi... dans une histoire sans paroles, donc,  car tout se joue (se « dit »?) avec des dessins. Pour une création commune conjuguant âges et générations.

            Une thématique un peu « légautienne » me semblait en jeu, autour globalement de l' « appropriation de l'événement » bien sûr, mais aussi a minima de l'échec, la jachère, le sens de notre vie, et bien sûr  la créativité, car ces thèmes couraient en filigrane dans ce début d'histoire que je vais vous résumer maintenant pour votre compréhension :

malgré des projets, rêves ou désirs forts d'un personnage central, les choses ne se passent pas comme prévu, comme anticipé... comment réagir et surtout s'approprier l'événement, ainsi que l'inattendu qui se trouve peut-être bien au rendez-vous... ?

 

Ce n'était pas seulement mon dilemme, mais celui d'abord du personnage mis en scène ! Plusieurs pistes d'idées s'ouvraient à moi, mais laquelle prendre, et surtout savoir tenir au long cours ? Il me fallut plusieurs mois pour entrer dans le challenge et trouver comment « tricoter  des crayons et des feutres », en ne restant pas en surface des choses, et en me laissant aller « en  profondeur » avec ce qui venait à moi... tout comme dans l'histoire de mes petites-filles où quelque chose « travaille » en profondeur même si c'est parfaitement à l'envers (du sens commun). Je reprends le cours de l'histoire, le premier acte, si l'on veut :

...une graine d'arbre est plantée, et malgré les soins attentifs prodigués, rien ne pousse... si ce n'est à l'envers, caché, invisible à nos yeux...

C'est superbe, non ? Et à la suite : « Mammie, tu peux continuer l'histoire !? Si tu pouvais continuer l'histoire...

            Réalité, imaginaire, symbolismes pluriels, tout était réuni pour une méditation hivernale ! Et comme au théâtre un deuxième acte va s'ouvrir, là, sur les rythmes de la nature auxquels on peut s'identifier (nuit/jour, pluie/soleil, et la terre qui mûrit, comme si elle  mûrissait un projet, comme une genèse partant d'un presque rien, et quelque chose advient, d'important, dans le rapport tout simple aux éléments primordiaux). Au troisième acte, retour des humains, s'éveillant comme d'un grand sommeil ( et/ou d'un long rêve?), une vie nouvelle semble reprendre sur ce bout de terre. Et venant de loin (dans l'espace, le temps?), des alter ego approchent (le personnage était seul au début.  Seul avec lui-même ), les nouveaux-arrivants semblent concernés par une même recherche, une  quête commune, comme s'ils se savaient ou se découvraient les mêmes « racines », et la même envie de  progresser... et qu'ils se rencontraient, chemin faisant. Et comme si de grandes distances se trouvaient abolies, là, un temps...

            Un quatrième acte de cette histoire pourrait être d'en parler ici, maintenant : une génération nouvelle ne se présente-t-elle pas à nous, même si quelques décennies nous  séparent ? Elle n'a pas forcément les mêmes codes de langage que nous (cependant avec des dessins on peut se comprendre parfois très bien...!), et au fond d'elle-même, une vie intérieure bat comme un cœur neuf... elle a envie d'être en lien avec nous peut-être comme dans un cœur à cœur, comme celui dont parle Marcel Légaut ? D'elle à nous : qui donne, qui reçoit ? Bien malin qui saura départager.

            Cette génération n'a pas 30 ans... même si elle n'a pas encore l'âge des commémorations, ne la laissons pas de côté.

                                                                                              Anne Seval